Dans les années 60, Framus était un des plus importants fabricants de guitares en Europe avant d’être rattrapé par la concurrence dans les 70’s. La marque allemande est revenue progressivement sur le devant de la scène ces vingt dernières années.
Propos recueillis par Guillaume Ley
Framus a une longue histoire qui débute en 1946, quand votre père crée la marque, et s’arrête au cours des années 70. Vous avez fondé Warwick en 1982, mais ne relancez Framus qu’en 1995. Pourquoi avoir attendu si longtemps ?
Hans Peter Wilfer (fondateur et président) : En fait, tout est parti de ma collaboration avec un Français, Bruno Bianchi, qui importait à l’époque des guitares Lâg : il a commencé à travailler pour moi en tant que responsable des ventes et, dans la foulée, m’a forcé la main pour relancer Framus. J’aurais peut-être même dû attendre un peu plus longtemps car Warwick venait de déménager à l’Est du pays et ce nouveau départ nous
a causé bien des soucis en interne. Je pense que cette période de dix ans entre 1995 et 2005 fut la plus dure de toute ma vie. Nous avons failli échouer à plusieurs reprises !
Aujourd’hui, vous possédez trois pôles distincts : en Allemagne (Markneukirchen), en Chine (Shangai) et aux États-Unis (Nashville). Quelles sont leurs différences ?
Notre siège social se trouve en Allemagne, ainsi que les ateliers où nous fabriquons des instruments très haut de gamme (entre 400 et 500 par an) et des modèles Teambuilt (environ 3000 exemplaires). J’ai fondé la branche chinoise en 1995 que nous utilisons pour effectuer nos achats sur place et pour contrôler notre production dans le pays. Chaque mois, nous envoyons une ou deux personnes en Chine pour effectuer le contrôle qualité de chaque instrument. Nous sommes très stricts sur ce point. Le pôle de Nashville a été créé en 2017 dans le but de gérer nous-mêmes la distribution sur le territoire américain et d’avoir une bonne vue d’ensemble de ce marché qui représente à lui seul 60 à 65 % du marché mondial.
Justement, quel est votre point de vue sur le marché mondial?
Je pense qu’aujourd’hui on produit beaucoup plus d’instruments qu’on ne peut en vendre. Et ce n’est pas très bon. Notre but est de fabriquer seulement ce que nous pouvons vendre sans mettre la pression aux distributeurs ou aux magasins. Nous sommes tout petits si on nous compare aux grosses compagnies américaines et nous avons une petite part de marché. Mais je pense que nous pouvons encore nous développer sans vendre à des prix inconcevables. La qualité, le commerce équitable, et le juste salaire pour nos employés, c’est ce qui compte le plus. Seuls des salariés heureux fabriqueront de bons produits. Mais cela reste une industrie sans pitié, dans laquelle il va nous falloir continuer à bosser sans relâche.
Warwick-Framus, père et fils « Mon père a monté Framus en 1946 et fut le premier de l’histoire de notre industrie musicale à lancer une marque à Bubenreucht après la Seconde Guerre mondiale. De nombreux travailleurs issus des Sudètes ont travaillé avec lui. Même les Höfner ont travaillé avec mon père. Il a dû arrêter en 1974 devant la pression des produits japonais bon marché. Ce fut le cas pour de nombreuses entreprises européennes et américaines. J’ai débuté l’aventure Warwick le 13 septembre 1982 avec 3 autres personnes dans un petit atelier en partant de rien (...) Aujourd’hui, nous sommes toujours une petite entreprise dont on ne peut comparer les résultats aux géants. Mais s’il faut retenir nos modèles qui ont le mieux fonctionner, je dirais la Panthera, la Diablo et la WH1 chez Framus, et la Corvette, la Streamer, et la Thumb Bass chez Warwick. »