On va commencer par ce quatrième album sous le signe du Zèbre… C’était quoi l’idée ?
Warren : C’est venu, je pense assez naturellement après l’écriture de la chanson Zebra, qui fait référence à ça… Après on s’est dit que ça serait marrant de développer pas tout à fait un concept album, mais presque… Plus ça allait, plus les titres avaient un côté très marqué. Enfin, chaque morceau ne ressemblait absolument pas à celui d’avant. Donc, il y avait comme des titres tout blancs ou tout noirs. On s’est dit : « Il y a le côté Yin et Yang aussi, vu qu’on est deux, peut-être qu’on peut jouer là-dessus… » Et puis pourquoi pas, après, mettre ça dans tous les clips et faire aussi une scéno complètement noire et blanche…
Dans le blues, il symbolise également l’uniforme des prisonniers…
Oui, carrément. Il y a ce sens caché dans la symbolique de l’album. Même si c’est aussi l’équilibre du Yin et du Yang qui décrit le mieux son contenu, varié et équilibré. C’est le plus équilibré de nos albums, alors qu’on a essayé d’introduire toutes sortes d’influences et aussi de produire chaque titre de façon différente.
En prenant le risque de vous perdre en route et de ne plus sonner comme du Ko Ko Mo…
K20 : Il était important de prendre un tournant. On a composé l’album précédent un peu plus en fonction du live. On aime bien être énergique sur scène, alors on n’osait pas trop faire des ballades ou sortir des guitares classiques ou folk… Là, on ose faire des choses parce qu’on a grandi. Des choses qui nous parlent plus. Ça fait même du bien d’avoir un passage acoustique. Warren a son morceau tout seul, Bottle For Two. Mais il y a un autre electro où c’est plus moi, même s’il y a toujours des guitares… Enfin ça reste « nous » quand même (rires). On a moins pensé en album live.
Warren : On s’est détaché de ce qu’on faisait avant, parce que, dans les albums précédents, on était un petit peu trop en regardant sur comment on va jouer ça ensuite… On ne va pas arranger ce titre comme ça si en live il faut complètement le changer. En fait, c’est des choses qui te mettent des freins. Donc autant faire une musique sur album qui te plaît et, après ça, le réarrangement live sera un autre problème.
Ko Ko Mo a assuré plus d’une première partie mémorable, mais on imagine qu’ouvrir pour Jack White n’a pas été une mince affaire pour vous…
Oui… Déjà, bien avant les concerts, ils ont un protocole avec les premières parties qui est d’une classitude extrême. Dans le rider (sorte de manuel avec les indication techniques, NDR) que tu que tu reçois, dès les premières lignes, ça commence par : « Nous nous efforçons de donner le plus beau des souvenirs aux premières parties qu’on accueille. » Donc tu sais que quand ça démarre comme ça, en général, c’est que ça va être cool. Et ils ont été très gentils avec nous.
Vous avez réussi à le rencontrer ?
K20 : Oui, mais tu te retrouves un peu comme devant Edward aux mains d’argent, quoi… C’est un personnage. En plus il était pipé blanc, il est grand… Tu as le manager qui est venu nous chercher, genre : « Tu fais une photo et puis tu t’en vas… » Mais, quand même, il prend un peu de temps pour nous. Et je pense qu’il est dans son personnage avant de jouer.
Warren : C’est clair. Déjà le fait d’être en monochrome bleu tout le temps, même dans les loges, qui sont en bleu et noir et blanc. Il reste dans un mood très fantomatique. Il fait aussi des petits cris. Un truc pour s’échauffer la voix. Donc c’est tu as l’impression d’avoir Dracula est à côté de toi. Il y avait de l’attitude, certes, mais la classe du mec aussi… Il a écouté les deux shows en entier, comme ça, en hochant la tête ! On a parlé un petit peu de musique. C’était bref, forcément, mais, déjà, de pouvoir lui serrer la main et lui dire merci pour tout ce qu’il faisait, moi ça m’allait très bien. Même si je suis le millième (rires).
Nous sommes chez Gibson, là. Warren, tu prépares enfin quelque chose avec la marque ?
Alors il n’y a pas de partenariat prévu, mais, en tout cas, c’est sûr, je joue avec beaucoup de Gibson. Voilà, c’est une marque que j’affectionne beaucoup. Il y a toujours eu une sorte de connexion avec les SG suivant les albums. Il y en avait chaque fois une différente, mais c’était toujours une SG. Ça restera ma guitare de cœur. Et donc, non, je ne sais pas forcément ce qu’on fait ici (rires). Il y avait aussi le nouveau showroom qu’il fallait qu’on voie…
Donc pas encore de Gibson SG Warren en vue ?
Une SG Warren ? Celle qui a brûlé (voir encadré) serait une bonne base, mais elle est impossible à reproduire, je pense. Mais non, et, franchement, je crois qu’il faut être une mégastar avant d’avoir un modèle signature. On en est très loin, même si je serais évidemment extrêmement touché que ça arrive. Ce serait un truc de fou.
En attendant, compte-tenu de ce qui a été détruit dans l’incendie du tourbus (voir encadré), tu t’es rabattu sur quoi pour l’album et la prochaine tournée ?
Comme la thématique était noire et blanche et qu’il fallait un peu se précipiter pour commander des instruments parce que la, tournée arrivait, j’ai d’abord eu la chance de trouver une super Gibson J-45 en noir et blanc, pour les parties acoustiques et il y a eu a aussi une Gretsch douze cordes toute blanche et dorée. Pour l’électrique, il y avait une deuxième guitare. En fait les gens ne savent pas, mais ce n’est pas une seule guitare qui a brûlé, mais deux. Heureusement, il y en a une qui s’en est mieux sortie que l’autre et c’était la noire. On l’a customisée pour la faire ressembler un peu à une SG standard Ebony, comme avait Angus, avec la longue plaque blanche et puis un Vibrola. Elle est devenue la principale de la nouvelle tournée. Et on a remis un micro de la brûlée dessus, pour qu’elle fasse quand même un petit bout de route avec nous. Et puis la brûlée reverra le jour sur scène, s’il y a une prochaine tournée qui n’est pas dans le noir et blanc (rires). Sur l’album, on avait un ami, Tox Géronimi qui avait fait des tournées avec Baschung, et qui vivait non loin du studio. Il retapait pas mal le matos vintage et des guitares aussi. Un jour, il m’amène une SG 67 standard et elle était dans un état incroyable. Il m’a dit : « Écoute, je te la laisse. Tu pourras la tâter un petit peu et même faire des prises avec. » Elle était incroyable ! Je m’étais pourtant juré de ne jamais acheter une Gibson rouge. Mais, quand on a un coup de cœur… Du coup, je lui ai racheté sa guitare (rires). Mais celle-là, elle restera à la maison ou en studio ! Même si je ne pense pas que ça va vous arriver une deuxième fois. Bordel, on a peut-être un chat noir, mais il ne faut pas exagérer (rires) !
Le morceau Wheels Of Fire évoque le drame qu’ont vécu Warren, K20 et leur équipe le 20 juillet 2023, lorsque leur tourbus a été dévoré par les flammes en quelques minutes. Personne n’a été blessé, mais une bonne partie du matériel est parti en fumée. Dans le métier comme sur les réseaux sociaux, un bel élan de solidarité s’est mis en place avec un crowdfunding qui a bien aidé. Même si les musiciens ont dû annuler une participation à Guitare En Scène le 21 juillet et plusieurs dates par la suite.
Warren : Ce n’est pas nous qui l’avons lancé, mais on a été extrêmement touché de cet élan de solidarité à la fois des gens qui nous suivent, du coup, dans les meilleurs moments et dans les plus mauvais. La profession aussi s’est mobilisée. Des gens qu’on avait croisés comme Matthieu Chedid, on nous a appelés pour nous demander si on avait besoin de matos… Les Shaka Ponk qui aussi ont été adorables. Ce sont des gens qui connaissent la vie de tourbus aussi… »