Avec « Collapse And Fail », troisième album aussi sombre que l’endroit où il a été enregistré est lumineux, le trio breton se fend d’une réalisation à la lourdeur imparable, entre sludge et post-metal.
Pour quelles raisons avez-vous choisi d’enregistrer une nouvelle fois au studio Kerwax ?
Fañch Le Corre (chant/guitare) : C'est un lieu que nous connaissons bien, tout comme les méthodes de travail de Christophe (Chavanon, le patron des lieux, ndlr). Du coup tout va beaucoup plus vite. Si on rajoute à ça le fait de pouvoir enregistrer tous les trois dans la même pièce, en live, et avoir un son naturel et organique, proche de celui de nos concerts, tous les ingrédients étaient réunis pour que « Collapse And Fail » soit une nouvelle fois réalisé à Kerwax.
Kerwax est réputé pour son approche analogique de l'enregistrement. Est-ce une manière de procéder qui colle parfaitement à votre style ?
À notre style je ne sais pas, mais à Stonebirds oui. Nous aimons enregistrer tous ensemble avec le minimum de clic possible, à l'ancienne. Le support que nous préférons est le vinyle, ça fait donc une chaîne logique. Après, Christophe utilise parfois un PC pour faire de l'édition et avec des morceaux de 8 minutes, c'est toujours pratique ! Le débat analogique/numérique n'est pas plus important que ça pour nous, c'est plus l'approche qui nous séduit. Si nous devons enregistrer exclusivement en numérique un prochain album, mais que nous pouvons toujours le faire live avec le son de nos amplis dans les casques, ça nous conviendra tout autant.
Autre réputation du studio, celle d'avoir un parc d'amplis et de micros vintage… Tu as dû y trouver ton bonheur, non ?
À Kerwax, le choix des amplis est vraiment cool pour les amateurs de vintage. Le studio a un partenariat avec Sévénéant Musique, qui doit être un des plus grands loueurs de backline de l'ouest de la France et qui a commencé son activité dans les années 70, il a donc accumulé des pièces assez incroyables. Le matos vintage, c'est beau, ça a souvent un super headroom et un son clair magnifique, mais pour les musiques typées metal, c'est rarement fou. J'ai juste utilisé un vieux combo Selmer du studio avec une pédale d’Overdrive pour booster le préampli. Mais cette configuration nous a servi uniquement pour des courts passages quand je cherchais un son ultra serré. Pour l'enregistrement, j'ai également troqué mon Hiwatt Hi-Gain pour un clone de Soldano SLO 100 que m'a prêté notre ingé son, le meilleur ampli sur lequel j'ai eu l'occasion de jouer à ce jour. J'espère pouvoir bientôt l'ajouter à mon rig de façon permanente. Quant au parc de micros vintage, il est impressionnant et chargé d'histoire. Pour la petite histoire, Christophe a racheté la marque Melodium et ressort maintenant les modèles à ruban de l'époque.
Et du côté de tes guitares ?
Je joue sur une Ibanez Les Paul de 1976, une copie conforme de Gibson. Il me semble qu’Ibanez s’est d’ailleurs pris un procès l’année suivante… Tout est d'origine à part un capot de humbucker. Je crois que les micros sont des Maxon, en tout cas ça sonne mieux que les Gibson de ces 30 dernières années. Si les amplis vintage ne sont pas trop ma tasse de thé, pour les guitares, je préfère les vieux modèles pas toujours confortables et qui pèsent un âne mort. J'ai commencé dans Stonebirds avec une Ekomaster de 1961 injouable, mais avec un son mortel. Plus on avançait avec le groupe et plus le son se devait d'être précis et agressif, et les vieux micros simples de l'Eko n'ont pas suivi. J'ai récemment acheté une Lâg Custom Bédarieux aussi avec des doubles Seymour Duncan splittables. Pour les sons clairs, elle est géniale à jouer, légère, bref tout ce que je déteste… C'est ce qui s'appelle vieillir, je crois (rires) !
Ce troisième album donne l'impression que votre musique est aujourd'hui encore plus compacte. Est-ce un choix que vous vous êtes fixés pendant l’élaboration des morceaux ou est-ce une évolution qui s'est dessinée pendant l’enregistrement ?
C'était notre choix dès le début de la composition. Nous voulions nous renouveler et créer quelque chose de plus frontal et sombre pour coller avec le thème de l’album qui est l'effondrement de notre civilisation. Comme dans tous nos disques, nous varions les émotions, mais sur « Collapse And Fail », les passages plus lumineux ne sont que de petites respirations pour mieux affronter la désolation qui s'en suit. Nous avons volontairement mis peu d'arrangements pour que l’ensemble paraisse plus cru.
Difficile de ne pas évoquer la situation actuelle et le manque de visibilité quant à la reprise des concerts, surtout pour un groupe indé, qui sort un nouvel album. Comment aborder sereinement la promotion de « Collapse And Fail » dans un tel contexte ?
Les plans sautent les uns après les autres et pour un groupe comme le nôtre les concerts représentent l'immense majorité de nos revenus. Il reste notre release party prévue pour septembre, mais nous ne savons pas dans quelles conditions elle se déroulera et si nous pourrons répéter avant ! Nous avons hâte de reprendre la route dès que ça sera possible, mais surtout, dans un premier temps, de se retrouver tous les trois pour faire du bruit !
Pour plus d'informations sur le matériel de Fañch Le Corre, cliquez ici.
Pour son troisième album, Stonebirds a signé avec Ripple Music, label californien créé il y a 10 ans et spécialisé dans le doom, le stoner et le heavy rock psyché.
« Après une expérience délicate avec notre premier label pour « Into The Fog », nous avions décidé de sortir nous-mêmes « Time », mais nous nous sommes rendus compte que nous perdions un peu en crédibilité vis-à-vis de certains médias et diffuseurs. Nous ne cherchons pas à jouer aux U.S.A et « Collapse And Fail » aurait pu sortir sur un label français, mais Ripple Music est doté d’un réseau large et bien rodé, qui permettra à l’album de bénéficier d’une forte promotion et d’être diffusé le plus possible. »