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GOJIRA - Fusion sonore

C’est un grand retour, et pas seulement au sens musical du terme. Après avoir conquis
 les États-Unis et installé son studio à New York, Gojira s’apprête à revenir tourner en France, un énorme album sous le bras portant le doux nom de « Magma ». Propos recueillis par Guillaume Ley

Si les discrets Christian (guitare) et Jean-Michel (basse) vivent dans l’Hexagone, on avait peu de nouvelles des frères Duplantier, suite à leur installation
 dans la Big Apple. Après avoir monté leur propre studio, Silver Cord, ils y ont enregistré leur nouvel album. Un disque au son plus rock et plus viscéral, qui montre une nouvelle facette du groupe, tout en conservant les acquis du passé, à commencer par cette science imparable du riff, ce jeu de batterie unique, et des ambiances aériennes beaucoup plus crédibles que celles offertes par un disque de bruits de la forêt chez Nature & Découverte. Gojira est de retour en grande forme. C’est un Joe tout sourire qui nous le prouve, tout en franchise et sans langue de bois.

La première chose que l’on retient de cet album, avant même de l’avoir écouté, c’est sa réalisation, effectuée dans votre propre studio à New York.
 Joe Duplantier : C’était pour nous,
le seul vrai moyen d’avancer à notre rythme, de ne pas se mettre de pression supplémentaire. Mais surtout de se sentir libres. Tu sais, la vie a changé, Mario (frère de Joe et batteur de Gojira. Ndr) et moi sommes devenus papas... Et puis, j’ai toujours eu cette sensation d’avoir plus l’âme d’un producteur que celle d’un véritable musicien.

En même temps, tu as toujours été producteur des albums de Gojira et vous aviez déjà votre propre structure avec le studio des Milans, en France. C’est vrai. J’ai toujours mis les mains dans le cambouis. Même mon approche de l’instrument a ce côté « vue par un producteur ». Je sais comment l’album doit sonner, quels sont les points importants à travailler... Alors qu’à côté de ça, je ne me considère pas comme un super guitariste. Je bosse ce que j’ai à bosser pour que ça passe. Je travaille vraiment dur. Mais je ne connais pas bien le matos, je suis assez limité. Une gratte, bon, il y a 6 cordes... (sourire). Mais j’aurai toujours besoin d’aide dans ce domaine. C’est surtout pour ça que je suis content d’avoir monté ce studio.

Tu veux dire que c’est un projet qui ne concerne pas exclusivement Gojira ? Quelque part, avec cette structure, je prépare mon avenir. Je ne sais pas de quoi demain sera fait. Deux albums d’autres groupes ont déjà été enregistrés dans ce lieu. D’abord, un groupe canadien nommé CAYM. J’ai coaché le chanteur, expliqué ce que je voulais à l’ingé son pour les prises. Et ensuite, j’ai bossé avec Car Bomb, que j’adore.

Le groupe new-yorkais, adepte
 de plans barrés, assez proche de Meshuggah ?
 Oui ! Je les ai d’ailleurs mis en contact. Un jour j’ai appelé Fredrik (Thordendal, guitariste de Meshuggah. Ndr) en lui disant : « Écoute ce groupe, ça devrait te plaire ». Et deux semaines plus tard, les mecs de Car Bomb me téléphonent pour me dire que Meshuggah les avait choisis pour les accompagner sur leur tournée US ! Ils étaient fous, et moi super content.

Donc, tu produis des groupes, tu travailles avec Gojira, et tu fais aussi des masterclasses dans ce studio, comme en avril dernier. C’est un exercice intéressant. J’adore avoir un échange en direct avec les gens. Je trouve ça passionnant et
très enrichissant sur le plan humain. Maintenant, on ne va pas se mentir, on avait besoin d’argent, parce qu’on était dans la merde financièrement. Les loyers à New York sont super élevés. Il fallait payer le studio, car les prods de groupes ne suffisent pas. On a donc
 fait ça deux jours d’affilée, un samedi 
et un dimanche, avec en moyenne 
25 personnes par jour. On a surtout parlé de dynamique de groupe, plus que de technique. On a discuté méthode, du fait de jouer lentement chaque partie pour mieux l’assimiler et la maîtriser...

Tu sais que de son côté, Christian réalise des masterclasses sur la guitare autour de Gojira en France ? Carrément ! Je n’ai pas encore réussi à en voir une seule. Et ça se passe bien ?

Oui, il y a beaucoup d’échanges, il 
est très humble, il fait monter des gens sur scène, ils peuvent essayer sa guitare...
 Ça ne m’étonne pas du tout. C’est quelqu’un de très simple. Il habite dans un petit bled dans le Sud-Ouest, il cultive ses légumes... Franchement, il est tranquille, et ça lui va très bien.

Revenons à ton travail de producteur, et au dernier album. Tu as été assisté malgré tout ?
 Oui, par notre ingé son live qui m’a vraiment bien aidé. On a fini par mixer à 4 mains. Il a fait un gros boulot. Il a été ingénieur sur cet album, à ne pas confondre avec producteur. Je dirige, je dis ce que je veux, il pose les micros, tire les câbles, on écoute, puis je dis : « oui, non, plus comme ça ». J’explique ce que je veux entendre, j’écoute aussi ses conseils, même si parfois je campe sur mes positions. Il y a notamment eu une discussion autour d’un son qui pouvait légèrement vrombir mais que je trouvais beau. Notre collaboration a été constructive. On se connaît très bien puisqu’il nous accompagne sur les routes, derrière la console.

Cela donne un album plutôt intense. Et surtout très « rock » pour du Gojira.
 Je suis content d’entendre ça parce qu’on a vraiment bossé sur autre chose que sur les deux précédents.

Pour tout avouer, j’ai renoué avec certaines vibrations ressenties sur « From Mars
To Sirius », sauf qu’en plus tu chantes en clair. Pourquoi avoir attendu tout ce temps ? En fait, ça fait longtemps que
 ça traîne. J’en avais tellement envie, mais je ne trouvais pas l’espace dans tout ce qu’on faisait. On a souvent pondu des riffs qui, bien entendu, appellent un chant plus crié, assez écorché... J’ai commencé à enregistrer des morceaux chantés quand on préparait « L’enfant sauvage ». Finalement, ils sont passés à la trappe. J’ai fait des essais pendant des nuits entières, en 2011, juste avant notre emménagement à New York. Mais, il y avait un truc qui ne collait pas. J’avais pourtant ce désir de chanter. Et puis, j’ai eu une petite frustration sur la tournée qui a quand même duré 3 ou 4 ans. Mais cela m’a permis de mieux me préparer pour la suite.

L’album semble « moins chargé », pour du Gojira. Il respire plus. On a encore une matière de dingues à côté. On a bossé plein de choses, aussi folles que mélodiques, en parallèle. On avait de quoi sortir 3 fois cet album. Je pense qu’on a encore de jolies idées à développer au cours des années à venir.

Et puis, il y a du nouveau… de la Whammy, comme sur Stranded. Ah ça, pour le coup, c’est vraiment tout neuf. Je ne sais pas pourquoi, Digitech m’a envoyé une Whammy un jour. Quand je jamme avec Mario, ma fierté, c’est de réaliser tous les effets à la main, bends et autres harmoniques. Et là, j’ai branché la Whammy. De temps à autre, je plaçais un peu de cet effet
 et ça a fini par donner un plan comme celui du riff principal de ce morceau.

Un effet relié à ta Charvel... Au début, tu étais chez Jackson. Les modèles ne te convenaient pas ? Christian et moi sommes tous les deux passés sur Jackson à la fin de notre période « The Link », vers 2003 ou 2004. « From Mars To Sirius » a été entièrement composé et enregistré avec des guitares Jackson. Christian était déjà à fond sur le modèle Randy Rhoads. Je jouais pas mal sur un modèle Soloist Custom. Au bout d’un moment, j’ai eu envie de changer. La forme ne me convenait plus. Je trouvais cette guitare bien réalisée, mais j’avais envie d’un truc un peu mieux. Les gars de Jackson ont commencé à bosser sur un modèle plus personnel. Mais ils ont vite vu que je n’avais pas l’air très satisfait. Alors, ils m’ont demandé si j’avais envie d’essayer avec Charvel. Je me suis dit pourquoi pas, et je me suis rendu dans leurs locaux.

Comment cela s’est-il passé ? Ils m’ont fait essayer plein de guitares. J’ai aussi rencontré le type qui s’occupe des micros custom. J’ai donc pu demander des modèles passifs particuliers, avec une jolie dynamique. Et surtout, on a pu bosser sur la forme de type Telecaster, parce que j’adore cette guitare.

On se souvient de photos de toi avec une Telecaster en main à l’époque de l’enregistrement de « L’enfant sauvage ». C’était un peu une obsession. J’en ai 3, dont une qui m’a été offerte par James Hetfield.

Ah, ben voilà, tranquille... Si tu savais. Pour la petite histoire, on 
a fait une tournée avec Metallica au cours de laquelle je n’ai utilisé qu’une Telecaster sur scène, et pas autre chose.

Tu veux dire, un bon vieux modèle classique, avec des micros simples qui provoquent un méga buzz sur le canal saturé de ton ampli poussé à blinde ? Je suis un fou, moi ! Faut pas me chercher (rires). J’avais des problèmes de larsen, un son saturé qui manquait de pêche, les plans en tapping étaient super mous... Mais je voulais avoir une Telecaster sur scène. Heureusement que Christian assurait avec sa Randy Rhoads. Après ça, j’ai commencé à penser à une guitare de forme Telecaster, mais mieux adaptée à la situation. James avait remarqué mon amour fou pour cette guitare. On en parlait souvent après les concerts.

Et alors... Et bien, un jour, un paquet est arrivé au studio. On l’ouvre, et je vois une vieille Tele toute abîmée, et en même temps super classe, avec cette patine, ce manche incroyable... et une carte postale. Je me suis dit que ça devait être à un fan qui voulait qu’on lui dédicace, puis qu’on lui renvoie la guitare, car ça nous est déjà arrivé. Je lis la carte, et c’était signé James Hetfield, qui me disait « voilà pour toi, Joe ». J’étais fou. En même temps, il a 600 et quelques guitares dans un entrepôt. Il y a une espèce de compétition entre Kirk Hammett et lui, pour savoir qui aura le plus de guitares. Ils en achètent tous les mois. C’est rigolo.

Maintenant que cet album est prêt, qu’on a bien parlé guitare, que tout semble rouler, un petit truc quand même : beaucoup de fans français vous en veulent, car ils se sont sentis délaissés au moment de la tournée « L’enfant sauvage », qui a presque ignoré la France.
 C’est vrai, nous en avons conscience. On a lu beaucoup de messages qui nous ont été envoyés. On a décidé de faire de la France une priorité. On veut faire des trucs spéciaux, rien que pour notre pays. On va déjà faire quelques festivals pour s’échauffer, mais après ça, on va accélérer le mouvement. Mais avant tout, on va aussi jouer chez nous, sinon on va se faire déchirer (il prend l’accent du Sud-Ouest). « Oh, hé, tu fais quoi là chez les ricains, et nous alors ? ». Tu sais, faut pas trop blaguer avec les Basques (rires). On va donc jouer à Biarritz. Et après ça, on va tourner dans le pays.

Zoom Matos

Charvel_Joe_Duplantier

Fan de Telecaster, Joe a choisi cette forme pour son modèle signature chez Charvel. Le corps est en acajou, tout comme le manche, renforcé avec du graphite. La touche est en ébène, ce qui permet d’obtenir des médiums et des aigus plus serrés et un grave mieux défini qu’avec du palissandre (plus de chaleur mais moins d’attaque) ou de l’érable (plus brillant mais pas assez sombre et demandant plus de travail pour la finition de la touche). Le manche est un modèle au radius compensé qui est assez épais car Joe aime bien les manches d’esprit Gibson. Et comme cet instrument va droit au but, un switch de sélection à trois positions et un seul volume suffisent avec un unique potard de volume.



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