Trio formé en 2010 du côté d’Atlanta, Whores a d’abord livré une paire de EP prometteurs en guise de tour de chauffe, pour ensuite balancer un noisy et fuzzy « Gold », sans doute l’un des meilleurs albums sortis en 2016, quelque part entre The Melvins, The Jesus Lizard et Future Of The Left. Christian Lembach, le frontman, nous en dit plus sur un groupe à découvrir de toute urgence. Propos recueillis par Olivier Ducruix - Photo : © Chad Hess
Comment se sont passés tes premiers pas de musicien ? Christian Lembach (chant/guitare) : Quand j’ai commencé la guitare, je devais avoir 13 ans. Puis, j’ai joué dans plein de groupes punk rock un peu partout. Il n’y a jamais rien eu de sérieux, jusqu’à la création de Whores. À un moment, les gens que je rencontrais me disaient : « mais tu es vieux ! Pourquoi n’avons-nous jamais entendu parler de toi ? » (rires).
Et comment as-tu su que l’aventure avec Whores allait devenir sérieuse ? Au début, nous avons surtout joué à Atlanta et dans les environs de la ville. Puis, nous avons commencé à faire quelques petites tournées et l’une d’entre elles nous a permis de jouer à New York. Lorsque nous sommes revenus dans cette ville pour y jouer une seconde fois, le concert était complet. Cela a eu un gros impact sur notre vision du groupe et sur le fait qu’on pouvait envisager de transformer un passe-temps pour le fun en quelque chose de plus sérieux.
Tu as donc joué dans moult petits groupes de punk rock avant de te lancer avec Whores. Est-ce ce genre de musique qui a définitivement façonné ton style ? Je pense que oui. Quand j’ai commencé à jouer de la guitare, j’étais plutôt intéressé par le heavy metal, mais je n’arrivais pas vraiment à comprendre ce que les musiciens faisaient parce que je trouvais ça compliqué. J’avais l’impression que c’était un univers hermétique pour le jeune musicien que j’étais. À cette époque, j’ai commencé à faire du skateboard et j’ai découvert en même temps le punk rock, les disques du label SST, Black Flag et, un peu plus tard, Sonic Youth, Hüsker Dü, et plein d’autres trucs similaires. Cette musique me parlait vraiment car je la trouvais accessible d’un point de vue technique et je me disais qu’il n’était pas nécessaire d’être un virtuose pour pouvoir jouer dans un groupe. La découverte du punk rock a réellement changé ma vie…
Whores étant un trio, est-ce difficile de récréer sur scène ce que vous avez mis en boîte sur « Gold », en particulier ces rajouts de parties de guitare que l’on peut entendre de-ci de-là ? Sur « Gold », j’ai enregistré pas mal de pistes différentes de guitare. Ce n’est bien sûr pas possible de toutes les rejouer en live. Parfois, je ne sais même pas laquelle jouer quand on part faire des concerts… Mais bon, l’exercice du studio et la scène sont des choses bien différentes. Je n’ai pas envie de rejouer en live la copie conforme de l’album.
Certains titres de « Gold » peuvent faire penser à The Jesus Lizard. Est-ce un groupe qui fait l’unanimité chez Whores ? C’est un groupe vraiment extraordinaire, mais Donnie, Casey (respectivement batteur et bassiste. Ndr) et moi, nous avons tous des goûts musicaux différents. Je ne suis pas sûr qu’ils aient chez eux un disque de The Jesus Lizard… Mais bon, c’est très bien ainsi ! Nous nous inspirons de la musique des autres en prenant des plans à droite, à gauche pour ensuite les transformer totalement. Dans un même morceau, tu peux avoir une partie qui te fait penser à Future Of The Left ou aux Queens Of The Stone Age et l’instant d’après entendre un riff très sludge à la manière de Eyehategod. La musique, c’est finalement quelque chose de très simple. Elle devient intéressante quand tu y mets ta patte pour créer ton propre style et quand tu y injectes de l’intensité aussi. Mais Whores n’est pas le genre de groupe qui va en mettre plein la vue avec de la technique. Ça n’est pas notre manière de voir la musique.
Zoom matos
Fuzz you ! La Whores Fuzz Freq est le fruit de la collaboration entre Christian Lembach et la marque Idiotbox Effects basée au Texas. C’est une pédale 2 en 1 avec d’un côté une Fuzz très 80’s dans l’esprit, équipée de transistors germanium, et de l’autre un filtre façon Wah. Les effets peuvent être utilisés ensemble ou séparément. L’une des grandes spécificités de ce modèle est que vous pouvez choisir quel effet à la main sur l’autre : avec le switch à gauche, c’est la Fuzz qui passe dans le filtre ; avec le switch à droite, c’est le filtre qui se voit agrémenté de Fuzz. Le potentiomètre de gauche gère la dose de Fuzz désirée, celui du milieu s’occupe du volume général, alors que le potard de droite contrôle la fréquence du filtre. Il y a même un trim pot à l’intérieur du magnifique boîtier pour affiner le réglage de la Fuzz. On peut écouter le son dévastateur de la Whores Fuzz Freq sur Participation Trophy, l’un des titres de « Gold ». Noisy ? Définitivement !