Se sentir plus léger avec une Telecaster sur les épaules… Oui, mais pas que : cette Fender Thinline profite aussi d’un vrai son d’antan. Une superbe guitare à la finition vintage qui ne manque pas de charme.
Instrument à part, la Telecaster Thinline est une incarnation fort intéressante de la guitare semi-hollowbody. Une base de solidbody, un corps pas intégralement creux : elle a su conquérir certains amoureux de la version standard, à la recherche d’une autre identité et d’un son un peu moins claquant. Au passage, son poids allégé est une bénédiction pour ceux qui passent des heures à jouer debout. La sortie de la série American Original en 2020 fut l’occasion pour la marque américaine de rendre hommage à ce modèle lancé en 1968, dans un esprit vintage. D’emblée, la magnifique finition Surf Green donne envie de pousser la Springverb au-delà du raisonnable. Il s’agit là d’une laque nitrocellulose, à l’ancienne... Au risque de la voir se transformer rapidement en version relic si jamais vous transpirez abondamment et donnez de gros coups de médiator sur la caisse. Mais quel charme ! Aussi, ce type de vernis laisse généralement le bois de la guitare respirer un peu plus, et sa belle ouïe invite le nez à venir en humer le parfum, et l’oreille à en écouter les résonances...
Vintage modified La prise en main est très agréable, voire surprenante quand on égrène les premières notes. Cette Thinline a beau avoir ses racines ancrées dans la fin des années 60, son manche possède un radius plus plat, pour un confort de jeu plus actuel. Ses micros, dont la conception a été supervisée par Tim Shaw, ont été pensés pour offrir un son authentique d’époque, dans le respect de l’originale. Le micro manche délivre une jolie chaleur et une belle rondeur auxquelles s’ajoute une certaine ampleur apportée par la caisse semi-hollow. Le micro chevalet possède ce côté plus pincé et aigu, mais le côté nasillard est atténué là aussi par la nature du corps. Bien entendu, l’interposition réunit ce côté précis avec un peu plus de corps, qui donne de jolis résultats avec un son crunch. Rien à redire, on sent certes le côté un peu plus ample, mais on reste définitivement dans le monde de la Telecaster.
Let’s twang again Et qui dit Telecaster, dit « twang » qui, s’il est moins évident, n’a pas disparu pour autant. Certes pas aussi claquant que sur la solibody classique, mais on conserve cette sonorité métallique et cette résonance qui font la joie des amateurs de country, de surf-music et de rock stonien. Finalement, le plus marquant, c’est la manière dont évoluent les notes par rapport à une autre Telecaster. On obtient un peu plus de rondeur et une sorte de respiration qui apporte ce côté aérien vraiment agréable, surtout couplé à une réverbe (et même un petit trémolo). En revanche, le sustain s’en trouve quelque peu atténué, le corps offrant moins de « matière vibrante ». Mais c’est à peine si vous vous en rendrez compte pour peu que vous placiez des effets de spatialisation dans la boucle. Belle comme un vieux pickup Ford qui vous emmène avec votre planche surfer les vagues californiennes, avec un son twang qui respire un peu plus qu’à l’ordinaire, l’American Original 60’s Telecaster Thinline est un hommage réussi, qui donne la sensation de faire un bond dans le temps. Une vraie saveur à l’ancienne. Guillaume Ley
Caractéristiques
Changement d'ère L’arrivée de la Telecaster Thinline au catalogue Fender a lieu trois ans après son rachat par CBS (1965). Une période controversée pour les adeptes de la marque californienne et synonyme d’une baisse de qualité. Mais ce changement d’ère donnera pourtant naissance à des modèles qui finiront par séduire certains guitaristes. Reconnu pour son travail chez Rickenbacker, le luthier allemand Roger Rossmeisl (engagé un peu plus tôt par Fender pour développer une ligne acoustique), se voit chargé de proposer une révision de la Telecaster, qu’il transforme de manière subtile en semi-hollowbody. Le premier modèle sort officiellement en 1968 et évoluera dès 1971 avec la Thinline II, équipée de humbuckers Wide Range conçus par Seth Lover (le père du PAF Gibson), qui avait rejoint la marque californienne trois ans plus tôt. D’autres variantes verront le jour au XXIe siècle, notamment dans la série Modern Player avec des P-90.