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FRED CHAPELLIER - Droit au but

Après un Best-Of célébrant ses 25 ans de carrière (2020), Fred Chapellier ouvre un nouveau chapitre avec « Straight To The Point », un album où le blues s’acoquine avec le funk et la soul. Un mélange détonnant pour le plus grand plaisir des fidèles du guitariste. Propos recueillis par Olivier Ducruix - Photo : © Philip Ducap

« Straight To The Point » a été pensé et élaboré pendant la période forte du Covid. De quelle manière celle-ci a-t-elle influencé l’élaboration et la teneur de ce nouvel album ? Fred Chapellier : Durant toute cette période, il y avait beaucoup de choses négatives qui traînaient dans l’air… Cela m’a poussé à aborder certains thèmes et à chanter de manière plus profonde, plus intense qu’à l’accoutumée. Il y avait comme une urgence à ce moment-là et ça se ressent dans l’album…

Dans le communiqué de presse accompagnant l’album, tu dis : « terminé le superflu ». Cela se traduit comment dans les chansons selon toi ? J’ai composé ces nouveaux morceaux finalement rapidement, sans m’embarrasser d’arrangements superflus, et en pensant surtout à la scène. Parfois, on a tendance à vouloir faire du sensationnel en rajoutant des plans compliqués. Là, non : je suis allé droit au but, d’où le titre de l’album. J’ai voulu faire simple et efficace.

Penses-tu avoir parfois cédé aux sirènes du sensationnel dans tes précédentes réalisations ? Je n’irai pas jusqu’à dire ça, mais j’ai parfois ajouté des plans qui ne servaient pas forcément la chanson. Sincèrement, ce qui m’importait le plus lorsque j’ai écrit ces titres, c’était l’efficacité, il fallait qu’ils sonnent uniquement avec une guitare et une voix.

Tu parles d’urgence dans ta façon d’aborder la composition, alors que, en pleine période du Covid, avec les concerts à l’arrêt, tu avais plus de temps que d’habitude. N’est-ce pas un peu paradoxal ? Quand je parle d’urgence, c’est vraiment par rapport à la composition des morceaux. Ça a été très vite parce que je voulais absolument garder un maximum de spontanéité. Du temps, j’en ai effectivement eu pendant les confinements, surtout pour faire les prises et penser aux arrangements, au mixage, sans oublier un travail vraiment conséquent sur la voix. C’est beaucoup plus un album de chansons que celui d’un guitar-hero.

Cette étiquette de guitar-hero, n’est-ce pas un fardeau parfois un peu lourd à porter alors que tu aimerais être plus reconnu comme un compositeur à part entière ? On ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre (rires) ! Je me suis présenté comme un guitariste avant tout, donc c’est logique et je l’accepte. Mais les gens prennent de plus en plus conscience qu’il n’y a pas que la guitare dans mon travail, même si elle n’est pas en reste sur cet album. La preuve, j’ai mis trois instrumentaux.

As-tu appliqué cette volonté de chasser le superflu au matériel utilisé pour enregistrer ce nouvel album ? C’est de plus en plus vrai aussi à ce niveau-là. Sur cet album, mis à part la reverb de l’ampli, j’ai juste utilisé une seule pédale pour cruncher, c’est tout, une Marshall Bluesbreaker première génération. C’est une pédale tellement géniale que j’en ai deux… et que les modèles de l’époque valent plus de 600 euros d’occasion ! Tous les morceaux très blues ont été joués avec une Gibson Flying V de 1988, la plupart du temps branchée dans mon ampli Scribaux signature Fred Chapellier, un 5W tout lampes, ou dans mon Tommy, un 30W de la même marque. Sinon, j’ai aussi utilisé une Telecaster incroyable faite pour moi par Alexandre Bouyssou (L’Atelier d’Alexandre, une Tele équipée de micros Seymour Duncan Brad Paisley, ndlr), une Fender Stratocaster Custom Shop Reissue ’63, ainsi qu’une Gibson Goldtop très classique, un modèle sorti il y a une dizaine d’années qui sonne terriblement bien.

Depuis plus de 25 ans, ton nom est indissociable de la scène blues hexagonale. Selon toi, la France est-elle réellement une terre de blues ? Bien sûr que oui, la France est une des terres importantes du blues. D’ailleurs, ça n’est pas pour rien si tous les Américains viennent jouer ici. Je joue assez régulièrement aux États-Unis et je peux te dire que, là-bas, le blues est véritablement moribond. Il faut savoir que bon nombre de gars, qui viennent en Europe et prennent de gros cachets, jouent pour 70 balles à New York ou à Chicago. J’y suis allé, je sais de quoi je parle. En France, il y a énormément de clubs qui programment du blues, des festivals dédiés au genre (Cognac Blues Passion, Cahors Blues Festival…), alors qu’on en parle très peu dans les médias grand public. En tout cas, j’ai la chance de pouvoir jouer dans des salles qui, à chaque fois, affichent complet. Le blues est bien vivant en France et il faut continuer de le faire vivre !

En parlant de concerts, toi qui passes une grande partie de ton temps sur la route, comment as-tu vécu cet arrêt total de la musique pendant les différents confinements ? Il y a bien sûr eu des moments difficiles… Mais au lieu de me lamenter, je me suis plongé corps et âme dans la réalisation de cet album. Et pour être franc avec toi, j’ai eu pas mal de soucis de santé et les deux années qui ont précédé la sortie de « Straight To The Point » m’ont permis de me reposer.

Tu fais allusion à tes problèmes d’audition ? Oui, entre autres, ces soucis auditifs m’ont vraiment handicapé pendant un an au moins, un véritable enfer. Et avant ça, j’ai été opéré du canal carpien de la main gauche parce que je ne sentais plus rien, avec en plus une grosse opération des cervicales, et tout ça entre 2017 et 2019. Finalement, ce fut un mal pour un bien car cette période de confinements à répétition m’a permis de récupérer. Aujourd’hui, je suis en pleine forme !

L’opération du canal carpien de la main gauche a-t-elle changé ta manière de jouer ? Heureusement, non ! Je n’en ai pas parlé à l’époque, d’abord parce que c’est flippant, ensuite parce que je ne voulais pas que cela alimente des rumeurs en tout genre. J’étais arrivé à un point où je ne pouvais plus jouer, je n’avais plus de sensations. Pour répondre plus précisément à ta question, j’ai eu l’impression d’avoir récupéré 200% de mes possibilités après l’opération, puis la rééducation. Je me suis rendu compte à quel point il avait été temps de faire quelque chose. J’ai pu retrouver le plaisir de jouer de la guitare et ce, très rapidement, pratiquement en une quinzaine de jours. Une vraie renaissance ! Je ne remercierai jamais assez les personnes qui se sont occupées de moi.









Le blues en mode NFT Concept né en 2014, un NFT (non-fungible token) est un jeton non fongible (contrairement aux crypto-monnaies), autrement dit un objet unique qui n'est pas interchangeable, auquel on ajoute une identité numérique stockée et authentifiée grâce à un protocole bien précis (blockchain). « Quand Dixiefrog Records m’a soumis l’idée de faire un NFT du titre Don’t Take me For A Loser via Pianity (première plateforme française de NFT musicaux, ndlr), comme je suis un instinctif, je me suis dit pourquoi pas. C’est bien de chercher des solutions alternatives pour pallier les baisses des ventes d’albums et, à mon avis, la disparition du CD dans les prochaines années. Les NFT sont-ils l’avenir ? Sincèrement, je n’en sais rien du tout, mais j’avais envie de tenter l’expérience. Cela ne me coûte rien vu que ce morceau, écrit une fois l’album terminé, est disponible sur la version vinyle, qui sera double, avec trois inédits, dont ce blues très classique. Il y a 100 NFT de Don’t Take me For A Loser et je suis très surpris du démarrage. Je ne sais pas si tous seront vendus, mais c’est plutôt bien parti. »

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